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    07Oct2019
    Lubrizol : conséquences toxiques pour le Gouvernement ?

    blog_VSC

    La situation créée par le terrible incendie de l’usine de Lubrizol, située dans la banlieue de Rouen, est exemplaire à plusieurs titres.

    Robin Letellier/SIPA

    D’abord sur la mécanique des crises, en effet le sujet quasiment étouffé par la nouvelle de la mort de Jacques Chirac revient sur le devant de la scène depuis la fin des cérémonies de commémoration par le prisme de la gestion de la crise plus que par la crise elle-même. Je serais curieux de savoir quel est le pourcentage de français qui pense qu’il y a encore un nuage noir au-dessus de Rouen et sa banlieue ? Aussi, le sujet est-il la communication (mauvaise, forcément mauvaise) du Gouvernement.

    Ensuite, justement, on reproche au Gouvernement sa passivité et son opacité. Un grand classique de la gestion des crises et / ou de ses critiques. En l’occurrence, le ministre de l’Intérieur était sur place le jeudi 26 septembre en fin de matinée, donc quelques heures après l’incendie. Mais, aussi quelques minutes avant l’annonce du décès de Jacques Chirac. En réalité, les media ont très peu relaté aux Français la présence du Ministre et de ceux qui ont suivis d’ailleurs. Notamment les chaînes d’information, concentrées sur la mort de l’ancien Président. La passivité prêtée au Gouvernement est en grande partie attribuable aux choix éditoriaux des media ; la question est de savoir si la présence de ministres aurait diminué l’inquiétude des Rouennais. Sur l’opacité, elle est due d’abord au respect, par le Gouvernement, d’une loi interdisant de divulguer la nature des produits dangereux présents sur un site industriel (loi anti-terroriste) et, par ailleurs, en raison de l’ignorance des conséquences à court et moyen terme de la combustion de ces produits sur la santé et l’environnement. La transparence n’est pas toujours possible pour des raisons techniques et scientifiques, mais dire que l’on ne sait pas est en soi une forme de transparence que les Français comprennent très bien, encore faut-il le dire et savoir se faire entendre sur ce point. Depuis, et après une semaine, le Gouvernement a corrigé le tir.

    Finalement, le Gouvernement n’aura pas totalement et rapidement mis en œuvre la règle du jeu TEM : transparence, nous en avons parlé. Empathie, là le défaut est plus embêtant, car elle a cruellement manqué et notamment de la part des représentants locaux de l’Etat. Et Mobilisation, le gouvernement a en effet donné l’impression d’un retard à l’allumage sur la mobilisation des moyens de l’Etat pour expliquer et rassurer les riverains. Or ce point est essentiel à une époque où on veut tout savoir tout de suite. La population attend des preuves de non dangerosité immédiatement, alors que les analyses tombent elles au compte-goutte. Ne pas communiquer en cette période c’est alimenter les peurs et laisser s’installer les fausses rumeurs.

    En conclusion, alors qu’il aura fallu attendre 5 jours pour que soit rendue publique la liste des matières qui ont brulé, nous ne savons toujours pas si la polution est très importante et surtout si elle est dangereuse. Mais une chose est sûre, on sait que le Gouvernement sera critiqué pour une gestion très perfectible de la communication de crise et que encore une fois les media auront joué un rôle non négligeable sur ce sujet.

    Arnaud Dupui-Castérès, Président de Vae Solis Corporate