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    14Déc2015
    Le hashtag, nouveau code de l’information par Adrien Loriller

    VSC

    hashtags11« Tu as raté ta vie de journaliste si tu n’as pas Twitter ! »[1]

    Tel était l’avertissement adressé à  Bruno Jeudy par quelques-uns de ses confrères du JDD.fr en 2011. Twitter, outil instantané de diffusion de l’information, a en effet révolutionné le paysage journalistique et le comportement des internautes.

    Cela fait maintenant quelques années que les européens passent plus de temps sur internet qu’à lire la presse écrite[2]. Comme PPDA durant le JT de 20h pendant plusieurs décennies, le hashtag devient une référence du monde de l’information, le symbole fort de ce qu’on appelle encore aujourd’hui « l’internet 2.0 » (probablement à tort tant internet n’est presque plus que ça). Véritable outil de référence pour la diffusion et la recherche d’informations, le hashtag bouleverse le rapport à l’actualité et certains chiffres illustrent cette évolution : en janvier dernier par exemple, environ 1,2 millions de posts ont contenu le hashtag #JeSuisCharlie sur Instagram[3], réseau social d’images, qui limite donc les possibilités de s’exprimer littéralement. Plus récemment, 15.000 comptes se sont abonnés au Twitter de la présidence américain (@Potus)… en une minute. Enfin, en novembre dernier, les dramatiques attentats de Paris permettaient au hashtag #PrayForParis d’atteindre les 6,7millions de mentions sur Twitter[4], 24 heures seulement après les événements.

    Certes, « tout va très vite avec internet ». Mais le plus intéressant est d’observer les comportements d’une personne qui souhaite s’informer aujourd’hui. Totalement ancré dans le quotidien des internautes, le mot « hashtag » a été le mot de l’année 2012[5], ce qui résonne comme une véritable consécration pour l’entreprise Twitter. Ce n’est pas pour rien qu’on le trouve presque partout, sur les pupitres présidentiels, sur les affiches de film ou sur les encarts publicitaires. Les liens que tisse chaque mot-clé entre les réseaux sociaux et donc entre les personnes sont étendus et donc puissants. Aujourd’hui, presque tout le monde peut suivre la campagne présidentielle d’Hillary Clinton sur Snapchat en gardant en tête le hashtag inclus dans l’image éphémère, qui pourra être inséré dans un tweet avec une photo filtrée par Instagram par le community manager de la candidate américaine. Et la boucle… n’est même pas bouclée, tant le mot d’ordre est l’instantanéité et la diffusion potentiellement infinie.

    Le hashtag reprend les grands titres du JT de 20h, il les contextualise. L’information qui en découle prendra la forme d’une photo, d’une vidéo réduite à quelques secondes (Vine) ou d’un message d’une centaine de caractères. Pouvons-nous pour autant considérer chaque twittos ou Instagrameur comme un journaliste ? Bien que l’oiseau bleu avait l’information du triste événement survenu dans le « #Thalys » une heure avant les médias[6] et que Snapchat a discrètement recruté des journalistes en vue de couvrir la présidentielle de 2016, il semble difficile de faire un tel raccourci sans au moins réfléchir sur ce qu’est le métier de journaliste aujourd’hui. Bien qu’il soit évident que ce métier ait largement évolué, le citoyen « petit reporter » avec son réseau social ne remplacera probablement pas le journaliste professionnel qui décrypte, informe et contextualise l’information.

     

    [1] http://www.inaglobal.fr/presse/article/twitter-est-une-drogue-dure-pour-les-journalistes-7653

    [2] European Media Consumption Consumer Survey 2006

    [3] http://www.grazia.fr/au-quotidien/news/instagram-en-passe-de-detroner-twitter-738146

    [4] http://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/2015/11/14/32001-20151114ARTFIG00015-prayforparis-portesouvertes-apres-les-fusillades-a-paris-la-solidarite-des-internautes.php

    [5] Selon l’American Dialect Society

    [6] http://www.reputatiolab.com/2015/08/attentat-du-thalys-twitter-avait-les-informations-1-heure-avant-les-medias/