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    13Fév2018
    3 questions à Dominique Danaë, directrice de la communication de Microsoft France

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    Photos : Adobe Stock (bannière) / DR (portrait)

    Dominique Danae

    Vae Solis Corporate : Vous avez évoqué régulièrement le fait que l’IA va bouleverser les métiers de la communication. En quoi vont consister ces bouleversements ?

    Dominique Danaë : L’IA, nous le savons, cristallise les peurs et exerce concomitamment une réelle fascination. À l’heure d’une infobésité croissante, d’une data omnisciente, comme de l’émergence de (ro) bots, d’objets intelligents, de nouvelles formes sophistiquées de machine learning, ou de fonctionnalités prédictives, l’IA, cette technologie disruptive, recèle de multiples facettes susceptibles de changer durablement nos métiers. Nous allons entrer dans l’ère du « communicant transformé » qui devra mener à bien à la fois sa mission d’accompagnement de la transformation de son entreprise et sa propre transformation. Par exemple, de la même manière que le monde du journalisme revisite ses contenus avec l’émergence de l’automatisation de fonctions rédactionnelles, c’est le cas de médias tels que le Los Angeles Times, nous sommes amenés, nous aussi communicants, à nous interroger sur l’apport de robots rédacteurs. Ces bots nous déchargeraient de l’écriture de certains contenus à faible valeur ajoutée (bios, descriptifs simples, etc.) ou accompliraient des tâches mineures telles que répondre à certains premiers niveaux questionnements au sein de sites presse : date de lancement d’un produit, rappel des points clés d’un discours, etc.

    Vae Solis Corporate : Comment s’expriment ces bouleversements au quotidien ?

    Dominique Danaë : Cette ère du « communicant transformé » nous affranchit de certaines missions répétitives et nous donne les clés de nouvelles tâches centrées sur la valeur. L’IA va ainsi augmenter nos capacités organisationnelles en planifiant des temps forts médiatiques, synthétisant des notes ou rédigeant des comptes rendus de réunions. Non seulement ces tâches automatisées libèrent du temps aux communicants qui peuvent ainsi s’attacher à raisonner des stratégies ou affiner des tactiques pertinentes, mais elles accroissent également leur efficacité en gommant d’éventuelles erreurs humaines.

    L’IA va également renforcer notre efficacité opérationnelle en mettant à notre disposition une boîte à outils optimisée pour les relations avec les médias : outils perfectionnés de diffusion de communiqués de presse, constitution de fichiers presse ultra qualifiés ou transcription de fichiers audio et vidéo en texte. Ainsi, les influenceurs identifiés par l’IA ne le sont plus sur la seule mesure de leur audience. Cette identification est le fruit de recherches multicritères et de données croisées telles que l’engagement, la fidélité à une marque, etc. L’IA va enfin développer nos aptitudes stratégiques en contribuant à prédire des tendances médiatiques, à observer finement les médias sociaux ou à prévenir des situations sensibles ou de crises potentielles.

    Vae Solis Corporate : Quelles conséquences opérationnelles y a-t-il pour l’organisation de votre direction et de vos conseils ?

    Dominique Danaë : Chez Microsoft, nous incarnons la culture de « Growth Mindset » prônée par notre CEO Satya Nadella. Cette culture refuse les schémas figés et privilégie au contraire la mise en avant d’un environnement apprenant, fondé sur la remise en question et la capacité de rebondir. Elle implique l’exercice du « test and learn » donc un droit à l’erreur et à la prise de risques au travers d’approches facilement réplicables, ou à contrario rapidement abandonnées si elles ne font pas leurs preuves. La direction de la communication ne fait pas exception et nous avons expérimenté, testé et mis en place des initiatives inédites ces dernières années. Par exemple, nous avons noué un partenariat innovant avec TF1 à l’occasion de l’Euro 2016 de football jouant la carte de la coproduction de contenus. Microsoft a ainsi donné accès à TF1 et à ses capacités prédictives, pour proposer des pronostics avant chaque match. Autre illustration qui constitue un marqueur fort des nouvelles compétences requises pour nos activités : l’apport du code et des développeurs. L’intégration de développeurs dans les équipes de com s’impose comme un sujet clé de réflexion. L’importance de connaître le code, langage du XXIe siècle, n’est plus à démontrer depuis qu’il fait désormais partie des programmes scolaires à partir de la 5e. C’est cette même logique qui me fait dire que créer sans délai des sites ou des apps, d’une part, disposer de nouvelles interfaces d’échanges, de bases de données interrogeables en ligne, d’autre part, constituent des enrichissements du rôle de communicant dont je pressens qu’ils vont de plus en plus prendre de l’importance.

    Texte intialement paru dans l’édition 2018 de 365°, le news tank de Vae Solis Corporate

    A lire : Chronique d’un communiquant en 2035, par Jawad Khatib, Florian Ridard et Antoine Lévèque