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    13Fév2018
    Chronique d’un communiquant en 2035, par Jawad Khatib, Florian Ridard et Antoine Lévèque

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    Nous avons imaginé à quoi pourrait ressembler la journée d’un directeur de la communication dans une vingtaine d’années. Plongée au coeur d’un futur dominé par l’intelligence artificielle…

    Photo : Adobe Stock

    Bienvenue en 2035 ! Je m’appelle Arnaud Verdier et je suis responsable du pôle Communication & Data d’un groupe leader de la grande distribution. L’arrivée d’internet ? J’ai connu. L’émergence des réseaux sociaux ? Je me suis adapté. La suite, vous vous en doutez, c’est l’intelligence artificielle (IA) et elle a bouleversé mon quotidien…

    Une équipe de la communication épaulée par son assistant virtuel

    Floriane, responsable des relations média, Thibault, data analyst, Mehdi, développeur, Nathan, responsable des relations extérieures, Tiphaine, digital brand manager : ce matin, tout le pôle est sur le qui-vive car à 10h a lieu l’annonce officielle de notre rachat d’un groupe concurrent brésilien. Nous travaillons sur le dossier depuis plusieurs semaines, épaulés par Neo, notre assistant virtuel. Chaque jour, il nous rappelle l’agenda, hiérarchise nos mails après avoir analysé leur contenu, et prépare pour chaque membre de l’équipe une synthèse média personnalisée. Contrairement à d’autres directions de la communication, nous avons fait le choix d’avoir un assistant virtuel commun, et non individuel, pour garantir la bonne circulation de l’information au sein de l’équipe.

    Comme lors de chaque annonce majeure du Groupe, Neo a pris soin de rappeler aux journalistes, blogueurs et influenceurs ciblés toutes les informations pratiques pour couvrir au mieux l’évènement. Dès la fin de la conférence de presse et la diffusion du communiqué, toute l’équipe de la communication se met en marche. La responsable média travaille en étroite collaboration avec Neo pour tenir la direction du Groupe informée des premières retombées médiatiques. Pendant ce temps, notre data analyst s’active à rassembler, classer et examiner les contenus multiplateformes liés à l’annonce de rachat afin de décrypter les ressentis instantanés et la perception des parties prenantes : clients, concurrents, décideurs institutionnels et l’opinion publique. Mehdi, notre développeur expert en coordination cross-canal, qui s’est chargé de diffuser la conférence de presse en live streaming sur l’une de nos nombreuses interfaces web et sous forme d’hologramme dans les rédactions qui n’ont pas pu se déplacer, actualise en temps réel notre site internet.

    Communicants : les nouveaux spécialistes de la donnée

    Je me souviens de l’arrivée de l’IA au début des années 2020, lorsque j’étais consultant en cabinet de conseil en communication. Le changement a été très rapide : spécialiste de la communication, l’apparition de logiciels et d’applications capables de simuler l’intelligence nous a permis de devenir des spécialistes de la donnée. Grâce à l’IA, nous étions en mesure d’exploiter dans son intégralité la masse de données produites par les entreprises qui pouvaient nous être utiles pour chaque type de communication. Progressivement, le travail de veille, de transmission d’informations simples aux journalistes ou d’envoi de communiqués de presse a été délégué à des assistants virtuels de plus en plus efficaces. Le profil des communicants s’est logiquement transformé et les équipes ont tout d’abord intégré des développeurs puis des data analyst. Alors que l’IA développait ses capacités d’analyses pertinente des données, nous avons renforcé la dimension « conseil » de notre expertise, concentrée sur les relations humaines et la compréhension de l’écosystème complexe au sein duquel évoluaient les entreprises.

    À partir du milieu des années 2020, la communication « robolutionnée », dopée par des systèmes technologiques sophistiqués, a également été capable de renforcer ses capacités de contextualisation, et de prendre en compte les grandes tendances qui animaient chaque partie prenante : un mini-cerveau humain doté d’une capacité d’analyse hors du commun. Lorsque je suis devenu responsable de la communication, l’installation de Neo, notre assistant virtuel, avait été ma première décision.

    Une communication « hyper augmentée »

    D’ailleurs, aujourd’hui à 18h, Neo nous envoie une alerte. Un homme politique à forte visibilité médiatique a publiquement dénoncé notre opération de rachat et pointé les risques d’une situation « monopolistique » qui entraînerait une hausse des prix pour les consommateurs. Après un rapide état des lieux du bruit sur le web réalisé avec notre digital brand manager, nous décidons de réagir rapidement. L’ensemble des équipes est convoqué d’urgence dans mon bureau. Paramétré par notre data analyst, Neo recense les cas similaires de dénonciation publique d’une opération de fusion sur les dix dernières années à travers le monde. Il analyse l’ensemble des articles parus, les réactions sur les médias sociaux, les diverses prises de parole des décideurs politiques et économiques, et relève les possibles décisions de justice liées à cette thématique, pour nous constituer un dossier synthétique. Ce dossier récapitule les cing grandes options possibles de communication, le timing optimal de réaction et une première proposition d’éléments de réponse en 15 minutes. Grâce à ses relais, notre cabinet de conseil en communication parvient à déterminer les motivations de cet homme politique, et nous apporte des informations que Neo n’avait pas pu prendre en compte, car absentes de sa base de données. À l’issue des dernières retouches, la direction est en mesure de réagir instantanément, dans le média le plus prescripteur, au moment opportun et avec les éléments de langage les plus adaptés au public visé. Ouf, en 20 minutes, la crise est gérée !

    Vous l’aurez compris, la vie de communicant en 2035 a évolué. Loin de l’apocalypse prévue et de la disparition de nos métiers, la communication s’articule désormais autour d’anciens et de nouveaux talents : data analyst, UX Manager, responsables des relations médias et influenceurs. L’analyse de données généralisée et l’assistance personnalisée ont été des outils qui ont permis à des entreprises comme la nôtre, d’être plus réactives, plus productives et de nous focaliser complètement sur l’élaboration de la stratégie et le choix entre différentes options possibles générées par l’IA. J’en suis désormais convaincu, l’intelligence artificielle a eu un rôle bénéfique pour la communication car elle nous a permis de nous reconcentrer sur la mission première de toute communication : donner du sens à l’action.

    Chiffres-clés :

    700 000 C’est le nombre de postes créés par les entreprises technologiques en France au cours des dix dernières années.

    20 % C’est l’augmentation de la productivité de la France d’ici à 2035 grâce à la modification de la nature du travail et la création de valeur permise par l’intelligence artificielle selon une étude du cabinet Accenture parue en 2016

    15,7 milliards C’est le montant d’ici 2030 des gains économiques que permettra de générer le développement de l’intelligence artificielle selon une étude réalisée en juillet par PwC.


    Jawad Khatib, Florian Ridard et Antoine Lévèque, consultants Vae Solis Corporate
    Texte intialement paru dans l’édition 2018 de 365°, le news tank de Vae Solis Corporate

    A lire : Entretien avec Dominique Danaë, dircom de Microsoft France